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Histoire de Mézidon Canon et de son canton
24 septembre 2009

Le château de Rupierre près de Biéville-en-Auge

chateau_de_rupierre

Rupierre, situé sur la commune de Biéville-en-Auge, est probablement issu de la famille de Rupierre. Ancienne maison normande ayant imposé son nom à toutes églises, chapelles, terres et fiefs qu’elle possédait aux titres et droits dont les grands seigneurs de province jouissaient à cette époque (XIe siècle).

A l’origine, la maison de Rupierre vient d’une petite paroisse près de Saint-Pierre du Jonquet. Elle est absorbée par cette commune en 1833.

blason_de_rupierre

Au XIe et XIIe siècle, la maison de Rupierre était citée souvent avec les maisons de Belleme et de Montgommery, leurs domaines étant contigus et tenant un rang important.

En 1066, un seigneur de Rupierre passa à la conquête de l’Angleterre. Quelques vingt ans plus tard, Guillaume de Rupierre prit le parti du Duc Robert de Courte-Heuse contre son père Guillaume (le Conquérant), Roi d’Angleterre. Suite à cela, le Roi Guillaume fit saisir les terres et possessions de ces puissants seigneurs. Il y avait aussi Robert de Belleme, Guillaume de Breteuil et Guillaume de moulins.

Ce Guillaume avait commandé, en 1090, les troupes du duc Robert de Courte-Heuse, et fut fait prisonnier au siège du château de Courcy. Robert de Courte-Heuse donna des sommes importantes pour sa libération. Le père et le fils firent ensuite la paix ainsi qu’avec les grands barons.

Plus tard, le Roi Philippe-Auguste (1165-1223) en créant les bailliages royaux restreint les droits et privilèges des grandes seigneurs dont les de Rupierre. D’après le Dictionnaire de la noblesse de F.-A. Aubert de la Chesnaye des Bois, Raoul de Rupierre serait devenu le premier bailli de Caen sous Philippe-Auguste, soit vers 1190 et avant Pierre de Thillay qui a obtenu cette fonction avant 1205.

Des deux enfants de Raoul de Rupierre, l’ainé n’eut qu’une fille, nommée Alix qui épousa Richard de Brionne. Les fiefs du 2e fils de Raoul, nommé fief de Canappeville releveront pour un demi-fief pour le Roi, une autre partie à l’Evêchée et au Chapitre de Lisieux et un autre tiers fut donné, en 1250, aux religieux de l’abbaye de Sainte-Barbe-en-Auge.

L’un des descendants de Rupierre, nommé Jean III de Rupierre, eut de Jeanne de Poillé un enfant, aussi nommé Jean. Jean III décéda le 26 décembre 1415, alors que l’enfant était seulement âgé de 5 ans. Ce dernier passa sous la garde-noble* du Roi.

A cette même période (1418), on trouve un Robert de Rupierre, abbé de Saint-Pierre-sur-Dives. En 1447, ce Robert tint un fort dans son abbaye où les habitants du bourg et des environs s’étaient retirés. Il y fut tué le 4 janvier 1447 au moment d’une attaque du bourg et fut enterré au milieu de la Chapelle de Sainte-Catherine.

Jean de Rupierre qui était sous la garde-noble du Roi prit, à sa majorité, le parti du Roi d’Angleterre. Ses biens furent alors confisqués par le Roi de France pour cause de désobéissance et furent adjugés à l’enchère aux assises d’Orbec, tenues à Lisieux, le 6 octobre 1436.

Cette guerre de 100 ans (1337 à 1453) fut un désastre pour la maison de Rupierre car leurs biens furent confisqués par le Roi de France lorsqu’ils prirent la cause du Roi d’Angleterre et par le Roi d’Angleterre pour ceux qui prirent la cause du Roi de France.

Est-ce à ce moment là, que le domaine de Rupierre (près de Biéville-en-Auge) passe aux mains des de Morant ?

 

blason_de_morant  De Morant, la seule maison de ce nom en Normandie et l’une des plus anciennes noblesse de cette Province, où elle a possédé des terres importantes, comme celles d'Escours, la Perle, la Morte, les Baronnies de Courseulles, Soliers, Coulouces, Rupierre & Bieville, la Baronnie du Mesnil-Garnier.

 

 

 

Le premier seigneur de Rupierre et de Biéville rencontré se nomme Thomas de Morant , fils de François de Morant, seigneur d’Escours et de Jeanne de Sucy (mariés en 1541).

Thomas de Morant fut baron du Mesnil-Garnier, d’Esterville de Rupierre et de Biéville-en-Auge, il est né le 1er mai 1543. Il achete la charge de trésorier de l’Epargne sous Henri III. Il est fait conseiller d’Etat en 1618 et meurt à Paris en 1621. En 1578, il avait épousé, Massiotte (ou Mariotte) Morel-de-Putanges, morte à Caen en 1621 et enterrée à Sainte-Barbe de Saint-Jean.

De leur mariage naquirent :

1 - Thomas, né en 1584, chevalier, seigneur et baron du Mesnil-Garnier, d’Esterville, de Courseulles et de Soulles suivant les partages fait avec son frère Gaspard.

Il devient conseiller au Grand-Conseil le 23 novembre 1605, trésorier de l’Epargne en 1617 sous Louis XIII, grand trésorier et commandeur des Ordres du Roi le 21 février 1621, conseiller du Roi en ses conseils d’Etat et Privé, fonde et dote un couvent de Dominicains, sous le titre de Saint-Thomas, dans sa terre du Mesnil-Garnier en 1620. Enfin, fonde à perpétuité les Prix qui se distribuèrent au College du Mont à Caen, occupé par les Jésuites.

En 1630, il acquiert la baronnie de Courseulles où il y meurt en 1651. Il fut inhumé aux Dominicains du Mesnil-Garnier. Il avait épousé en 1609 Jeanne Cauchon de Trélon (morte en 1622) et Françoise de Vieux-Pont en septembre 1624. Il eut 10 enfants de ses deux épouses. L’un de ses descendants obtiendra par Louis XIV, en 1672, l’érection de la terre du Mesnil-Garnier en Marquisat sous le nom de Morant.

2 - Gaspard qui, en 1621, et suivant les partages fait avec son frère Thomas, deviendra auteur de la branche des seigneurs et barons de Rupierre et de Biéville-en-Auge. Il est conseiller du Roi en ses conseils d’Etat et privé et trésorier des Ponts & Chaussés. Il épouse le 12 mars 1624 Marie le Comte-de-Montauglan. Il est mort en 1656.

3 – Anne qui épousera Jacques de Cauvigny, chevalier et seigneur de ce lieu et de Biéville.

4 – Jeanne, deviendra Dame du Bois d’Aubigny, mariée, par contrat en date du 2 novembre 1604, à Charles de Bec-de-Lièvre, chevalier et seigneur de Hocqueville et de Brumare.

5 – Madelene, sera mariée par contrat le 28 janvier 1609 à Pierre de Boutin, chevalier et seigneur de Victot et Grand-Bailli de Caen.

Gaspard, 2e fils de Thomas de Morant, a eut un fils : Charles-Thomas de Morant, chevalier, seigneur et baron de Rupierre et de Biéville, maréchal de bataille dans les armées du Roi. Il est confirmé dans sa noblesse en 1666. Il meurt le 2 juillet 1698 et est enterré dans le chœur des dominicains de Caen, parce qu’il était le neveu du créateur du couvent de cet ordre au Mesnil-Garnier. Il avait épousé le 22 décembre 1654 Valentine de Chasot, fille de Bernard de Chasot, écuyer et seigneur de Grandbois et d’Elisabeth le Tenneur-de-Langrune. Elle est morte le 10 avril 1710 et fut enterrée auprès de son époux.

De Charles-Thomas et Valentine, naquirent :

1 – Bernard, chevalier, seigneur et baron de Rupierre, né le 24 octobre 1655 à Saint-Jean de Caen et décédé le 10 mars 1724. Il n’a pas eu de descendance de son mariage avec Marie Françoise le Moutardier-du-Rodé.

2 – Charles-Thomas, était appelé le Chevalier de Rupierre. Capitaine de dragons, il meurt le 15 février 1715 sans avoir été marié.

3 – Léonor, religieux dominicain à Lisieux, meurt au bourg de Torigny en 1713.

Ce sont donc les deux sœurs Marie-Gabrielle et Antoinette qui hérite des biens de leurs frères. Marie-Gabrielle meurt le 30 juin 1752 à l’âge de 85 ans.

C’est donc aux descendants d’Antoinette que reviennent les terres de Rupierre et de Biéville.

Elle a épousé Henri François de la Bonde d’Hiberville, vicomte de Thorigny. De lui, elle a un fils Charles François de la Bonde d’Hiberville qui épouse le 21 décembre 1724, Marie-Catherine le Cordier-de-Bigards-de-la-Londe (sœur du Marquis de la Londe). Ils eurent un garçon qui meurt à 7 ans et une fille unique qui suit :

Anne-Françoise de la Bonde d’Hiberville est née le 13 octobre 1726, elle est la seule héritière de la branche des barons de Rupierre, dame et patronne de Biéville, elle se marie par contrat, le 25 mai 1752, à Thomas-Charles de Morant, Marquis et Comte de Penzès… qui n’est autre qu’un cousin éloigné.

Ce Thomas-Charles de Morant, né en 1727, est mousquetaire du Roi dans la seconde compagnie à l’âge de 17 ans. En 1745, il commande une compagnie de cavalerie dans le régiment de Saint-Jal. Le 2 janvier 1748, il est nommé par le Roi, maître-de-camp des dragons de la Reine. Devient chevalier de Saint-Louis en 1757. Brigadier des armées du Roi le 10 janvier 1760. Maréchal le 25 avril 1762. Il décéde le 13 octobre 1763 en son château de Bréquigny et est inhumé dans l’église Saint-Germain de Rennes.

Le Mercure de France de décembre 1763 annonce sa mort en ces termes :

« Messire Thomas-Charles, marquis de Morant, comte de Penzès, baron de Fontenay et de Rupierre, seigneur châtelain de Bréquigny, chevalier de l’Ordre royal et militaire de Saint-Louis, maréchal du camp et armées du Roi, député au Roi en 1757 par la noblesse de Bretagne, assemblée aux Etats, mourut le 18 octobre dernier, en son château de Bréquigny, âgé de 36 ans et 2 mois ».

 

 

Anne-Françoise de la Bonde d’Hiberville meurt le 20 octobre 1767 et fut inhumée dans le chœur de l’église de Biéville-en-Auge.

 

 

 

Dans l’église, sur une table de marbre noir portant un blason, on peut lire :

Cy-git
Très haute et très puissante
Dame, Madame Anne Françoise
De la Londe d’Hiberville
Décédée en son château de
Rupierre le 20 octobre
MDCCLXVII
Veuve de très haut et très
Puissant Charles Comte
De Morant
Maréchal des camps et armées
Du Roi, mort à son château
De Bréquigny près Rennes le
20 octobre MDCCLXII
Elle fut le bonheur et l’exemple de tous ceux
Qui vécurent avec elle
Faisant jouir son époux des fruits d’une sagesse
Dont les leçons instruisaient ses enfants

De leur union, ils eurent 4 enfants :

1 – Thomas Marie Thibaut de Morant, né à Paris le 30 août 1754 et décédé en Bretagne au château de Bréquigny, le 18 juillet 1757.

2 – Thomas Marie Louis Geneviève de Morant, née au château de Bréquigny le 30 juillet 1754 et baptisé le lendemain à l’église Saint-Etienne de Rennes. Devient chevalier, marquis de Morant, comte de Penzès, baron de Fontenay, seigneur et patron de Rupierre. Il est suffisamment de haute noblesse pour être autorisé à monter dans les carrosses du Roi.

Il épouse le 14 mai 1781 en l’église Saint-Sulpice de Paris, Thérèse Hippolyte Hélène Sanguin, fille du marquis de Livry. Thérèse Sanguin de Livry fut présentée à la Cour le 17 juin 1781.

Il apporte la terre de Brécé à sa sœur, Marie-Charlotte, épouse de Le Gonidec. Mais celle-ci ayant émigrée et étant décédée, la terre de Brécé fut confisquée et vendue par la Nation le 7 septembre 1796. Thomas de Morant la rachète pour la somme de 24296 livres et la rend aux enfants de sa sœur.

Thomas Marie Louis Geneviève de Morant sera le dernier seigneur de Bréquigny et représentant mâle de la branche aînée des marquis du Mesnil-Garnier, il mourut sans descendance, à Paris le 10 avril 1832. A cette même époque, il n’existe plus, non plus, d’héritier mâle de la branche des barons de Courseulles et d’Eterville. Le titre de Marquis échoit à la branche des barons de Coulonces.

3 – Marie Françoise Félicité de Morant, née le 6 mai 1753 au château de Rupierre. Elle fut baptisée le lendemain, son parrain fut son grand-oncle maternel le Marquis de la Londe, nommé Jean-Baptiste Le Cordier de Bigard. Ce dernier dut émigrer à la révolution, ne voulant céder aucun de ses privilèges, ni acquitter les dettes de l’état. Ces biens furent pillés. Sa marraine fut la marquise de Morant, son aïeule.

Elle se mariera en 1772 avec Esprit le Roux, Baron d’Esneval et Marquis de Grémonville. Ils auront une fille Zénaïde Le Roux d’Esneval qui se mariera avec Paul du Val du Manoir.

4 – Marie Charlotte Joséphine de Morant, née le 2 novembre 1759 et baptisée le même jour à l’église Saint-Etienne de Rennes. Elle se marie le 3 août 1775 à Rennes, avec Armand Le Gonidec, Marquis de Traissan. Elle meurt à Walcott, en Angleterre, le 23 avril 1794, elle avait 34 ans.

Le magnifique château de Rupierre fut démoli un peu avant la révolution, ne laissant que quelques dépendances. Les plans anciens de ce château étaient conservés par le duc le Gonidec de Traissan.

Du mariage de Charlotte de Morant et d’Armand Mériadec Le Gonidec, naissent un garçon et une fille. Les deux héritiers Le Gonidec de Traissan vont épouser respectivement la sœur et le frère du Plessis d’Argentré, enfants de Pierre Marie Alexis du Plessis d’Argentré et de Thérèse Dubois.

Ils héritent de la terre de Rupierre. Leurs enfants respectifs vont se marier entre cousins et vont donner 8 enfants. La terre revient au Le Gonidec de Traissan.

Voire la généalogie succincte reconstituée : ici

Ci-joint, le château de Rupierre au XVIIIe siècle (Atlas Trudaine). Chateau_de_Rupierre_XVIIIe_si_cle

En 1867, d'après la Statistique Monumentale de A. de Caumont, ne subsiste du château qu’un pavillon et des bâtiments disposés autour d’une cour carrée. Un vaste jardin existe derrière le château. A cette époque, le domaine était occupé par un fermier et appartenait encore aux héritiers du Marquis du Plessis d’Argentré.

Le château de Rupierre est maintenant une maison de retraite médicalisée de 12 lits.

* Garde-noble : administration de biens des enfants mineurs, laquelle appartenait aux père, mère ou autres

Source : Dictionnaire de la noblesse de F.-A. Aubert de la Chesnaye des Bois, 1778. Les de Morant, barons et marquis du Mesnil-Garnier, Albert Bruas, 1892. Statistique monumentale du Calvados, volume 5, par A. de Caumont, 1867.

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Commentaires
F
Bonjour,<br /> <br /> J'y suis passé en 2011 (aout) et c'était apparemment une maison de retraite ou de convalescence. Dans les années 1970 la demeure était une ferme exploitée par la famille Alquier. C'était apparemment Hubert Alquier qui exploitait. Sa soeur Elisabeth Alquier devint Elisabeth Alquier Gabara et était médecin du travail pour le groupe Sanofi Aventis et habitait dans la région parisienne. Je pense que Hubert Alquier habite toujours la région.<br /> <br /> Cordialement<br /> <br /> François
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F
Bonjour,<br /> <br /> Je lis " Le Chateau de Rupierre n'est plus une maison de retraite depuis 2006." <br /> <br /> Qu'est-il devenu?<br /> <br /> François Queval
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T
Bonjour,<br /> <br /> Le Chateau de Rupierre n'est plus une maison de retraite depuis 2006.<br /> <br /> Cordialement.
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A
Bonjour,<br /> Oui je sais, mais je n'ai malheureusement rien trouvé sur la période avant la maison de retraite, je n'avais même pas le nom de l'ancien propriétaire, je suis donc preneuse de toutes informations que vous voudriez bien me fournir.<br /> Cordialement.
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H
Bonjour, <br /> Vous avez oublié une bonne partie de la vie du château de Rupierre, car avant qu'il devienne une maison de retraite celui-ci était habité par la famille Pierre Alquier durant plus d'un quart de siècle. Merci de bien vouloir rectifier cet oubli. Si vous avez besoin d'autres renseignements n'hésitez pas à me contacter<br /> Hélène
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